LES POLEMIQUES ET CONFLITS AUTOUR DU 17 OCTOBRE.

Quelle est la signification du 17 octobre 1806 ?
Boukan News, 10/20/2024 – Pétion qui avait participé au complot pour renverser l’empereur avait une interprétation de cet événement. Il avait parlé d’une « sainte insurrection ». « Dessalines fut frappé à mort par le premier coup de fusil qui a été tiré depuis cette sainte insurrection ». De plus, dans une lettre menaçante à Christophe au début du conflit pour la mise en place d’un nouveau gouvernement à l’occasion de la préparation des électeurs pour remplacer l’empereur, il avait écrit ceci : « Si le peuple n’a pas craint d’abattre la tête de Dessalines, pourra-t-il trembler devant les intrigants et les ambitieux subalternes ?»
Résumons un peu. La mort de Dessalines est la conséquence d’une « sainte insurrection » populaire. Pétion n’a aucun problème de conscience et n’est coupable de rien. Il a liquidé un tyran, un dictateur, un mauvais administrateur, un voleur, un massacreur, un immoral, un sanguinaire, etc. Ne parle-t-on pas jusqu’à aujourd’hui du massacre des Français ? Il a fait une œuvre sainte, digne de la postérité. Il a sanctifié son acte et a cru tellement à la justesse de sa cause qu’il a écrit à Mme Dessalines pour lui annoncer la mort de son mari et lui offrir sa protection. L’histoire libérale avec Beaubrun Ardouin reprend la même thèse, accuse Dessalines de « subversion sociale ».
Il a fait de l’empereur un criminel, un méchant : il avait promis aide et protection aux colons le 2 janvier 1804 pour tous les engloutir. On comprend que dans ces conditions, l’histoire dominante, celle des vainqueurs et des classes oligarchiques possédantes ait choisi de fêter la mort de Dessalines comme fête de la révolution, de la liberté et de la démocratie. De 1807 à 1842, on a célébré la fin de la tyrannie et de la dictature par une messe solennelle. Le pouvoir politique libéral avait mis l’histoire à leur service en chantant leurs prouesses chaque 17 octobre. Avec la reconnaissance de l’indépendance dans des conditions humiliantes pour notre dignité de peuple et notre souveraineté nationale, à partir de 1836, un vent naturaliste souffla sur le pays. On réclamait à tort et à travers la protection du commerce national, de l’industrie nationale, l’enseignement de l’histoire et de la géographie d’Haïti, et une littérature originale, ancrée dans les mœurs et les traditions du pays haïtien.
L’histoire fait une autre route et Lysius Salomon organisa le 17 octobre 1842 une cérémonie funéraire aux Cayes en l’honneur de Dessalines et, dans un vibrant discours, retrace l’oeuvre de Dessalines comme nationalisme intransigeant et radical et comme patriote. La lutte idéologique ne prit pas fin. Au cours de l’histoire, il devint un républicain, celui qui a fait de l’Etat la chose publique, un mauvais administrateur, un bloc, un socialisme avant la lettre, un libérateur. Dessalines pose un problème et toujours Quant au simple citoyen, il attend une réponse. «Ki mò ki touye lanperè?» Après la mort de Dessalines, une chanson populaire avait pris position contre cette arrogance libérale, contre le mensonge de Pétion : “Nan Pont-Rouge sila Lamò fè Dessalines doukouman Konplo sila Li fò pase wanga Gade mizè moun Gade traka peyi la Peyi la chavire Lanperè Dessalines ou se vanyan gason Pa kite peyi a tonbe Pa kite peyi gate.” La mort de Dessalines est le fruit d’un complot. Les loas de Dessalines étaient trop faibles devant la force de ce complot qui a chaviré le pays.
L’histoire dominée, celle des exclus, des marginaux de la culture et de la connaissance savante, celle de ceux ou de celles qui ne savent ni lire, ni écrire nous invite à revisiter notre histoire nationale par ces mots qui sont restés dans la tradition historique de notre communauté : “Depi lanmò Dessalines, peyi a chanje.”
Roger Petit-frère (publié le 18 octobre 2013)