L’Autre Guerre : Réginald Boulos VS André Apaid Jr !
Par Joël Léon
Réginald Boulos sait se faire des ennemis. Il a le secret de se positionner comme adversaire redoutable des hommes et des régimes politiques.
André Apaid Jr et Reginald Boulos furent deux incomparables copains, comme on dit en créole «2 marasa ». Jamais l’un sans l’autre. Cette association de mauvais aloi força Jean Bertrand Aristide à quitter le pouvoir « manu militari ». Il a été poussé à traverser l’Atlantique et prendre refuge dans les confins de l’Afrique du Sud. Boulos/Apaid était un couple de choc !
Mais le mariage ne dura pas beaucoup. Très tôt, des fissures apparaissaient. Apaid, d’après une source digne de confiance, avait doublé son profit par rapport à Boulos, en une courte période de 12 mois. Il profitait merveilleusement bien des largesses portuaires de Gérard Latortue. Boulos, mécontent, s’était rendu au palais pour s’en plaindre à Alexandre Boniface, le président de facto de l’époque. Comme le ponce Pilate de la Bible, Boniface s’était lavé les mains, tout en pointant du doigt (dwèt bouwo l) à l’endroit de Gérard Latortue, le premier ministre de facto.
Arrivé à la primature, avec le ton fracassant qu’on le connaît, il est monté sur un récif insurmontable. « Gwo Jera », en dépit de son âge avancé, n’accepte pas qu’il soit l’objet d’impertinence dans son propre fief. Encore pire, en face de ses employés. Il réagissait avec force en passant des ordres formels pour foutre Boulos à la porte. Latortue, tellement sidéré par le comportement cavalier de Boulos, le lendemain, montait à la radio pour dénoncer la cupidité et l’insatiabilité de certains hommes d’affaires haïtiens.
Au cours d’un échange avec un « ami », il est ministre, il critiquait vertement le ton arrogant des bourgeois haïtiens qui s’adressent aux autorités politiques sans aucune marque de respect. Le paradoxe, c’est que cet homme fait partie du gouvernement actuel qui ne jure que par Sherif Abdallah, Antoine Zuraik, Gilbert Bigio, Reynold Deeb…ces bourgeois, cessent-ils d’être des arrogants ? C’était une parenthèse, revenons à nos deux préoccupations : Boulos et Apaid !
Compte tenu du fait que les jours de Latortue étaient comptés, Boulos stoppait temporairement sa cavalcade de bourgeois. Au cours des élections, il misait gros sur le professeur Leslie Manigat. Son poulain a été battu dès le premier tour par René Préval. On se souvient de la fameuse déclaration du célèbre professeur : « Bonne Chance au Pays ! Bonne Chance au Pays ! Bonne Chance au Pays ! ». Boulos s’était recyclé dans le camp de René Préval, mais sans se faire membre du parti au pouvoir, il conservait son allégeance au RDNP. Certes, Il recevait des avantages, mais gardait son sens de la mesure…il était membre d’au moins l’une des intempestives « commissions présidentielles » de Préval. Après la fin de mandat de René Préval, Boulos préparait son entrée politique, croyant que l’heure de Myrlande Manigat, finalement arrivait.
Mme Myrlande, l’épouse de l’ancien professeur, entretemps mort, allait recevoir la fessée de sa vie par les Clinton. Étrangement, ils choisissaient Michel Martelly, le plus con des candidats. Selon un ancien membre du RDNP, « les Etats-Unis ne tolèrent pas les Manigat. Ils ne leur font pas confiance. Si aucun des Manigat se trouvait en face d’un chien, les américains choisiraient le chien ». C’est venu de quelqu’un qui avait pris l’initiative de présenter et défendre la candidature de Leslie Manigat par devant qui de droit à Washington.
Ensuite, à partir des échanges que j’avais eus, moi-même, avec le professeur, je peux confirmer qu’il avait bien compris qu’il y a un groupe d’hommes dans ce pays que l’Américain ne supportera jamais. Boulos déçu de la fessée de Mme Manigat, comme bon encaisseur, il observe, prend des initiatives, timidement se prépare pour jouer un rôle actif dans la politique haïtienne.
Abordons maintenant M. André Apaid Junior
André Apaid Junior est un cynique. Il est orgueilleux et revanchard. L’autre défaut de l’homme, il est profondément raciste. Un ami me racontait une anecdote à propos de M. Apaid, lorsque Jean B. Aristide faisait appel à lui pour qu’il soit son ministre du commerce, naturellement une invitation qu’il avait platement refusée. Se sentant si ofisqué, il confiait, en ces termes, son étonnement à un groupe de gens de son entourage, du fait que Jean Bertrand d’Aristide avait le toupet de penser à lui pour être membre de son gouvernement : « Comment Aristide, ce petit prêtre « gwo dyòl », espérait-il m’avoir comme son ministre, c’est-à-dire que j’aurais à prendre des ordres de lui ? », l’assistance riait à gorge déployée. Cela donne une idée de la profondeur de l’arrogance de M.Apaid et son mépris pour les citoyens issus des masses, mais qui représentent pourtant plus de 95% de la population d’Haïti.
Aujourd’hui, Apaid est l’un des plus grands bénéficiaires du gouvernement de Jovenel Moise. Il vient de recevoir plus de 8000 hectares de terre, on parle aussi de plus « 18 millions de dollars américains » de la part de l’État haïtien, sous le fallacieux prétexte de construire 3 zones franches dans le pays. Aristide est beaucoup plus présentable que Jovenel Moïse, il est détenteur d’un doctorat, sans oublier les livres publiés, sa popularité, son renom international…si M. Apaid parlait de lui en ces termes dérogatoires et méprisables, qu’en est-il de Jovenel Moise ?
De toute évidence, c’est la catastrophe. Cela me ramène à une autre anecdote du même genre. Elle concerne Sophia Martelly et Martine Moïse, la première dame de facto. Sophia reprochait à son mari, Michel Martelly, du fait qu’il n’avait pas pris le soin de considérer qui était la femme de Jovenel Moise avant de jeter son dévolu sur lui pour qu’il soit président de la République. Pour elle, « Martine est une disgrâce qui n’aurait dû jamais, au grand jamais, se trouver au palais national comme première dame ». Revenons à notre homme, André Apaid Jr
En voyage dans l’état de Floride, la semaine dernière, je profitais du temps pour lire…ainsi, je décidais de terminer le bouquin très intéressant de mon ami Bernard Sansaricq, « Le Parcours d’un Combattant ». Un livre extrêmement intéressant qui traite du fonctionnement de l’opposition haïtienne en terre étrangère et de son expérience comme sénateur de la République. Arrivé à la page 82, j’ai vu le nom de M. André Apaid Sr. L’histoire, c’est que M. Sansaricq racontait sa stupéfaction, à son retour d’exil en 1986, lorsque Gilbert Bigio, 6 fois milliardaire, lui reprochait du fait qu’il ne l’avait dit merci, en signe de reconnaissance, pour les 50.000 dollars américains qu’il lui avait envoyés en 1982.
Cette date correspond au débarquement de la première vague d’un groupe de 8 révolutionnaires haïtiens, dont notre fameux poète Richard Brisson. Ce dernier fut héroïquement tombé les armes à la main pour libérer son pays de la dictature.
M.Sansaricq rétorquait, qu’il n’avait nullement reçu de l’argent de lui. Ainsi, M. Bigio cita le nom de M. André Apaid Sr comme la personne à qui l’argent a été remis au nom de Sansaricq. En réalité, M. Apaid Senior utilisait les services de son jeune fils, Apaid Junior, pour s’assurer de transiter l’argent à son destinataire. Notre Apaid, celui qui fait la une de ces deux dernières semaines, débarqué à Miami, remettait $ 20.000 à M. Serge Bazelais et M. Poisson Fabius, pourtant les $ 50.000 furent destinés à M. Sansaricq pour financer les activités de son mouvement d’invasion. Il conservait les $ 30.000 qui restèrent dans sa poche jusqu’au moment où j’écris ce texte.
Le père de Mr Apaid Jr entretenait des relations de proximité avec les services secrets d’un pays étranger très influent en Haïti. Il recevait de l’argent pour les informations qu’il fournissait. Il est bruit qu’avant sa mort, il aurait passé le job à son fils, qui n’était personne d’autre que M. André Apaid Jr.
Dans la saga qui oppose Boulos et Apaid, ce dernier est en train de gagner. Il marque des points importants. Il est officiellement en possession de près de 8000 hectares de terre, et de « 18 millions $ », d’après le journal officiel de la République, Le Moniteur. Tandis que Boulos, non seulement il est tombé en disgrâce dans l’entourage immédiat du président, mais aujourd’hui, Jovenel Moïse promet de le ruiner économiquement et de le foutre en prison, tout ceci avant la fin de son « mandat ».
Apaid a un avantage considérable sur son ancien frère siamois (Reginald Boulos). Il ne parle pas, il agit. Il dicte, Jovenel Moïse applique. Il ne promet pas, il agit. Il a la culture du résultat dans ses combines. Il voit partout des avantages.
On se souvient de la « loi Hope » qui accordait d’énormes avantages fiscaux au secteur de la sous-traitance en Haïti. Un secteur que Mr Apaid Junior a le contrôle total. La Loi Hope, c’est quoi ? (Lisez : Haiti, Failed Private Sector, Failed State)
Haïti est un pays pauvre, entre autres, avec un taux de chômage de 41%, un taux d’analphabétisme de 48% et 60% de personnes vivant en dessous du seuil de pauvreté. Dans le même temps, une main pleine de 5 familles contrôle toute la richesse. Le gouvernement américain a tenté à de nombreuses reprises de stimuler le secteur privé en Haïti à travers de nombreux programmes tels que : « Food Conservation and Energy Act (HOPE) » en 2006 ; Opportunité continentale haïtienne grâce à la loi d’encouragement des partenariats « (HOPE II) (2008) » ; en 2010, « Haïti Lift Programme (HELP) ». Ces initiatives ont été mises en place pour stimuler les investissements étrangers en Haïti et pour rallier le secteur privé à se racheter en profitant de ces programmes qui ouvrent les portes via « Éligibilité au traitement hors taxes en vertu de la Loi sur les partenariats commerciaux du bassin des Caraïbes (CBTPA) ». Le principal objectif était de créer des emplois ; le secteur privé haïtien n’a pas saisi l’occasion... En termes clairs, le secteur de la sous-traitance avait bénéficié de cette loi pour exporter certaines marchandises aux Etats-Unis, sans payer d’impôts.
Les businessmen haïtiens, ne pouvaient vraiment profiter de ses accords commerciaux qui aideraient à créer des milliers d’emplois dans le secteur de la sous-traitance. Qu’est-ce qu’ils faisaient, ils passent des accords souterrains avec des producteurs d’autres pays caraïbéens et ailleurs pour faire entrer leurs marchandises sur le territoire américain, comme si elles provenaient d’Haïti, en échange de quelques miettes. Cette histoire avait fait un tollé…
Donc, chers amis lectrices et lecteurs, à côté de la lutte contre le pouvoir de facto, il y a une autre guerre silencieuse, opposant Boulos à Apaid !
Joël Léon
Il est temps pour la masse de decouvrir ce que dont les dites bourgeois organisent a leur sujet.