L’arrogance du premier des Français à l’endroit des premiers Haïtiens

L’arrogance du premier des Français à l’endroit des premiers Haïtiens

Esau Jean-Baptiste

Boukan News, 11/21/2024 – L’arrogance du premier des Français envers les premiers des nôtres

Naturellement, quand un diplomate fait des commentaires sur la problématique des crises politiques en Haïti, il faut regarder ou penser beaucoup plus loin que la valeur de vérité ou de contre-vérité de sa déclaration.  Car cette dernière pourrait, à court et à long terme, avoir des conséquences sérieuses dans la gestion politique du pays. Mais quand un président français dit une absurdité sur des dirigeants haïtiens, comme l’a fait le président Emmanuel Macron en marge du Sommet des G20 à Rio de Janeiro cette semaine, il y a donc lieu de comprendre que ce comportement raciste est allé trop loin. Et tout en faisant une analyse du passé de la politique haïtienne de façon à mieux comprendre le discours du premier des français, ce texte a pour objectif de faire le plaidoyer pour faire respecter les autorités de mon pays par rapport à un président français raciste.
Haïti est le pays qui, par ses luttes contre l’esclavage et grandes victoires contre l’armée expéditionnaire de Napoléon Bonaparte tout au début du 19e siècle, a fasciné et surpris le monde.
N’empêche, les grandes puissances d’alors étaient hostiles à l’indépendance d’Haïti.  Depuis lors, plus de deux cents vingt ans après la grande épopée de Vertières, avec une ingérence à outrance dans les affaires politiques du pays, encore pour le malheur d’Haïti, cette hostilité continue.  Et ce ce monopole sans une Métropole comme du temps de l’esclavage a créé des handicaps et problèmes de toutes sortes au développement à la première République noire.
En effet, que ce soient après 1804 où l’international n’avait pas reconnue l’indépendance du pays, les turbulences politiques de plus de deux siècles, il y a un gros complot des grandes puissances qui pèse sur Haïti. Ainsi, tourmentée par cette grande indifférence internationale qui continue à traiter le pays comme leur arrière-cour, mais d’une façon très complice avec leurs alliés qui sont comme de mauvaises herbes sauvages et des immondices de toutes sortes dans un terrain abandonné, le peuple haïtien continue, dignement, de lutter pour sa survie politique, économique et sociale contre des malfrats dont l’odeur, certaine fois, donne envie de vomir.
Certes, depuis leur indépendance en 1804, ce pays demeure politiquement instable. À l’échelle internationale, Haïti est considérée comme un État en faillite. Il est le pays le plus pauvre de l’hémisphère, selon des experts et donneurs de leçons de l’international qui, de leur côté, détiennent une part non négligeable de responsabilité dans cette instabilité. En effet, les grandes puissances incarnant l’impérialisme occidental faisaient et continuent de faire payer à Haïti l’arrogance historique de se proclamer une République indépendante, nègre de surcroît, face à l’impérialisme occidental. Et cette arrogance, présentant Haïti, selon la trilogie de Rayford Logan, comme une « anomalie, une menace, un défi » pour l’ordre international raciste et esclavagiste a conduit ses puissances à asphyxier le pays politiquement et économiquement. Talleyrand ne disait-il pas qu’il faut laisser Haïti « cuire dans son jus » ? En étouffant Haïti de cette façon, ces colons du temps moderne veulent non seulement ridiculiser l’épopée de Vertières, aussi, par la même occasion, ils veulent rappeler à tout petit pays qui veut être indépendant de regarder l’état actuel d’Haïti.
Face à l’arrogance du premier des Français, les premiers des nôtres doivent réaffirmer leur dignité et leur souveraineté. Les mots de Macron ne sont pas qu’une insulte ; ils sont un rappel que la lutte pour le respect d’Haïti est toujours d’actualité. Ce n’est pas seulement une question d’honneur national. C’est un combat pour une reconnaissance globale de l’histoire et des sacrifices du peuple haïtien. Haïti n’a pas besoin de leçons, encore moins d’insultes. Ce dont elle a besoin, c’est de partenaires qui respectent son droit à l’autodétermination et soutiennent ses efforts pour construire un avenir meilleur.
Comme l’écrivait Constanze Villar, “le discours diplomatique est souvent langue de bois”. Mais il peut aussi devenir une arme puissante pour renforcer ou affaiblir des nations. En insultant les dirigeants haïtiens, Macron a choisi de s’inscrire dans une tradition de mépris. Mais pour Haïti, chaque mot blessant est une raison de continuer à se battre pour la reconnaissance, la justice et la souveraineté.
La décision du CPT ce jeudi 21 Novembre de convoquer l’ambassadeur de France en Haïti, M. Antoine Michon, pour fournir des explications autour des déclarations de son président est une initiative louable. En prenant cette mesure, le CPT affirme symboliquement la souveraineté du pays et sa volonté de ne pas accepter des insultes ou un mépris diplomatique injustifié.
Cependant, cette réaction, bien que nécessaire, reste insuffisante face à la gravité de la situation. Au-delà d’un rappel à l’ordre diplomatique, la nation haïtienne attend davantage de fermeté, de vision et de leadership de la part du CPT pour défendre la dignité nationale et répondre aux défis cruciaux auxquels Haïti est confrontée.

Prof Esau Jean-Baptiste

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