Diplomatie : une expression de prospérité, de souveraineté et de citoyenneté ! (Partie 2 )

L’expression de la souveraineté nationale (2e partie)

Joel Leon

 

Boukan News,12/25/2024 – En 1804, Dessalines inaugura « le réflexe de la souveraineté nationale anticoloniale ».  Henry Christophe et Alexandre Pétion l’appliquaient avec ténacité et autorité. Boyer l’abandonna en 1825, lorsqu’il décida d’accepter les termes de reddition de Charles X. Anténor Firmin l’avait rétabli au cours de la tentative de l’amiral Gherardi d’annexer le Môle Saint-Nicolas en 1897.

Depuis toujours, les Etats-Unis d’Amérique représentent la seule menace à la souveraineté nationale de la république d’Haïti. Il est vrai que pendant tout le 19e siècle, les Allemands, les Anglais et les Espagnols, par moment humiliaient le pays, mais ils n’avaient jamais tenté de menacer directement sa souveraineté nationale.

Pour la première fois, en 1915 Haïti avait temporairement perdu le privilège d’être le « premier épître nègre » souverain du monde lorsque l’Amérique l’envahissait et l’occupait. La fin du 20e et le début du 21e siècle allaient être très compromettantes et avilissantes pour l’héritage sacro-saint de Jean Jacques Dessalines et les ancêtres, car la souveraineté nationale devint une passoire. D’abord, les Américains en 1994 et 2004, puis en 2024 lorsqu’ils ont engagé des Kenyans comme de vils mercenaires pour fouler le sol haïtien. Comment restaurer la souveraineté nationale dans un monde globalisé, ou le chantre du nationalisme est enroué ?

En tout premier lieu, il faut essayer attentivement de comprendre le processus de transition dans lequel le monde se profile actuellement, en particulier avec les changements qui s’annoncent aux Etats-Unis d’Amérique avec le retour en force des ultraconservateurs au pouvoir. Car, le poids diplomatique de tout empire est incontournable dans les relations internationales. Spécifiquement, lorsqu’on considère les conflits internes entre le libéralisme nouveau et le conservatisme ancien à l’intérieur de l’empire américain. Comprendre l’évolution de cette confrontation, qui peut prendre des développements meurtriers, est nécessaire aux pays du tiers-monde pour mieux se positionner sur l’échiquier international.
“Les républicains représentaient le triptyque de Reagan : le conservatisme budgétaire, la droite religieuse et les faucons de la politique étrangère. Les démocrates représentaient la classe ouvrière, le changement et les causes des militants libéraux”. Cette réalité a revolutionnairement changé au cours de ces dix dernières années,Je me permets de faire un saut à l’intérieur du système de l’empire étoilé. 2

L’Amérique, pendant plus d’un siècle fut un État « isolationniste ». Il s’occupait de ses oignons, mis à part le nouvel hémisphère qu’ils ont toujours considéré comme son arrière-cour. Il fallait l’arrivée de Theodore Roosevelt et de Woodrow Wilson à la maison blanche pour changer cette trajectoire et ouvrir l’Amérique au monde.

Pour Roosevelt, d’après un résumé de Kissinger, « Il insista sur un rôle international des Etats-Unis dans les affaires mondiales, parce que tout simplement ses intérêts nationaux l’exigeaient et envisageaient mal l’équilibre mondial du pouvoir sans la participation américaine ».

Tandis que pour Woodrow Wilson, il est question d’internationaliser la « doctrine de Monroe », étendre l’exceptionnalisme américain. Pour lui, « l’Amérique avait une obligation de ne pas seulement s’assurer de sa participation dans le jeu de la balance de pouvoir, mais de répandre ses principes parmi les acteurs des affaires internationales ». En réalité, il prit fait et cause pour le messianisme américain qui le guide vers un rôle prépondérant dans le processus de la civilisation du monde. Il plaça la démocratie comme doctrine politique et le libéralisme comme théorie économique à la tête de cette croisade pour sauver le monde de lui-même.

Pendant environ plus d’un siècle, le wilsonisme inspirait et guidait la politique étrangère des Etats-Unis sur la planète. Cependant, depuis l’an 2000 les stratèges néoconservateurs américains s’inquiétaient du 21e siècle qui venait de commencer, comment s’assurer qu’il reste sous la domination des Etats-Unis. En 2001, ils allaient occuper la maison blanche pendant huit ans avec George Bush fils, mais l’imprévisible incursion de Barack Obama, un Afro-Américain, à la présidence en 2009 allait bouleverser les stratégies politiques concoctées. Ce qui créa un sentiment de panique chez les conservateurs qui se recyclaient de plus en plus à droite du Spectrum politique, pour ne pas dire l’extrême-droite. Cet esprit, animé par « fear and ignorance », a été exploité magistralement par l’équipe de Donald Trump pour gagner les élections en 2016, puis en 2024. Le plan de la politique étrangère de la nouvelle administration est d’abandonner le wilsonisme au profit du retour à l’isolationnisme.

Ce choix politique de l’administration de Donald Trump sera particulièrement dommageable pour le continent américain, spécialement Haïti.

D’entrée de jeu, le président élu a déjà annoncé les couleurs. Récemment, il menaçait le Canada et le Mexique d’une sanction tarifaire de 25% de plus s’ils n’arrivaient pas à lutter pour réduire le flot de migrants qui traversent ses frontières sud et nord. Il arrivait même à proposer pour que le Canada devenait le 51e État américain tout en promettant de réduire les taxes des citoyens à 60%, il menaçait de prendre le Panama (110 ans de cela, les Etats-Unis perdaient 38.000 hommes pendant la construction du canal de Panama) aussi bien que le Greenland pour renforcer la sécurité de son pays, sans oublier que Trump divaguait déjà sur la possibilité pour qu’un riche achète le territoire d’Haïti. Donc, le concept de souveraineté nationale ne fait pas le poids dans la conception politique de Donald Trump.

L’isolationnisme américain est un danger pour la souveraineté des pays de l’hémisphère. Tout désengagement international va renforcer la vision « l’Amérique aux Américains ». Ce qui va réinitier une ère de grands tourments pour les États des Caraïbes, de l’Amérique Centrale et du Sud. Haïti, 3 fois victimes d’interventions militaires des Etats-Unis dans le passé et qui est actuellement en proie à d’énormes difficultés économiques, politiques et sociales, est directement dans la visière de la nouvelle administration américaine. Sans vouloir être le prophète de malheur, la souveraineté nationale de la république d’Haïti n’a jamais été si en péril qu’aujourd’hui.

Comment faire face à cette menace avérée ?

Comme je l’avais déjà écrit dans la première partie du texte, seule une solidarité réelle entre les pays du tiers-monde peut assurer leur développement économique et sauvegarder leur souveraineté nationale. En ce sens, la république d’Haïti doit initier ce grand mouvement émancipateur, parce qu’elle a beaucoup plus à perdre et se trouve déjà dans les yeux du cyclone. Cependant, est ce que le pays est doté d’un personnel diplomatique approprié pour lancer cette mobilité libertaire autonomiste ?

Finalement, il faut abandonner cette tendance antinationale qui consiste à faire appel à l’étranger en situation de crise. Il faut ajouter une clause dans la nouvelle constitution qui condamne à la prison ferme tout haïtien, de la société civile ou du gouvernement, qui invite une autre nation à s’immiscer dans les affaires internes du pays. La souveraineté nationale de la république d’Haïti doit-être placée au-dessus de toutes formes de compromis !

Joel Leon

Références :

New York Times, “ Trump’s Reelection Defines a New Era of American Politics “.

Is the American Century over? Joseph s. NYE Jr

World Order, Henry Kissinger

Academia, “How Fear and Ignorance Birth the Unpredictability in America”. Joel Leon

The death of the west, Patrick J. Buchanan

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