Des oligarques sont détenus à Miami, d’autres renforcent leur mainmise sur Haïti.
BOUKAN NEWS, 28/09/2025 – Depuis l’arrivée de Laurent Saint-Cyr comme coordonnateur du Conseil Présidentiel de Transition (CPT), l’ensemble du champ politique et économique paraît désormais dominé par un unique groupe : les élites fortunées. Tout semble orchestré au bénéfice de l’oligarchie haïtienne. Il est avancé que les postes clés des douanes nationales seraient passés sous le contrôle direct de la famille Beaussan, qui continue de consolider sa puissance financière au fil des transitions successives. Aujourd’hui, ce groupe semble même sur le point de dépasser le clan Bigio en termes de volume d’affaires.
Didier Fils-Aimé, fort de sa position de premier ministre, consolide progressivement son pouvoir dans le but d’assumer seul la direction du pays à partir du 7 février 2026, date marquant l’échéance de l’accord du 3 avril. Son objectif est de reproduire le précédent d’Ariel Henry, qui avait gouverné Haïti sans l’appui d’un parlement ni d’un président durant près de trois années, entre 2021 et 2024. Véritable stratège politique, Fils-Aimé s’emploie à neutraliser systématiquement tout potentiel obstacle à son accession exclusive à la tête de l’État.
Le premier ministre Didier Fils-Aimé a donné des directives formelles au directeur de la PNH, Mr André Jonas Vladimir Paraison, afin de réduire le nombre de policiers chargés d’assurer la sécurité de Fritz Jean, figure influente du Conseil Présidentiel de Transition. Ce geste attise une rivalité déjà existante, oscillant entre discrétion et affrontement direct, entre Fritz Jean et Fils-Aimé. Actuellement, la tension entre les deux hommes est palpable. Fritz Jean reproche au Premier ministre d’avoir saboté son dispositif de sécurité durant ses six mois à la tête du CPT, période au cours de laquelle il s’est consacré à la lutte contre la montée des gangs. D’après lui, Didier Fils-Aimé aurait pris possession et retenu les fameux drones, considérés aujourd’hui comme les armes les plus puissantes de la Police Nationale d’Haïti dans sa lutte contre les groupes terroristes « Viv Ansanm ».
Pendant ce temps, les proches du Premier ministre Didier Fils-Aimé et de Laurent Saint-Cyr rencontrent de sérieux revers aux États-Unis et dans d’autres pays. Par suite de l’interpellation et la détention de Reginald Boulos, c’est désormais Dimitri Vorbe qui a été appréhendé par les autorités migratoires. Tous deux sont incarcérés dans le même établissement pénitentiaire, situé dans leur bastion de Miami. Par ailleurs, certains membres des familles Baussan et Colt se voient retirer leur droit d’entrée aux États-Unis, sans que la moindre explication ne soit fournie.
Laurent Saint-Cyr, qui espérait rencontrer Donald Trump lors de son déplacement aux États-Unis pour l’assemblée générale des Nations-Unies, n’a finalement pas eu l’opportunité de s’entretenir avec le président américain. Ce voyage, particulièrement onéreux pour les finances publiques haïtiennes, s’est déroulé avec une délégation d’environ 35 personnes accompagnant le coordonnateur du CPT à New York, engendrant des dépenses avoisinant les 200 000 dollars américains sans résultats concrets pour le pays. Autrefois, les missions officielles haïtiennes à l’étranger permettaient de rapporter des avantages tangibles à la nation. Aujourd’hui, malgré la pauvreté qui sévit, les hauts responsables semblent multiplier les déplacements coûteux qui profitent surtout à eux-mêmes, se préoccupant davantage des indemnités journalières que du bien-être d’Haïti.
Reynold Deeb aurait quitté discrètement le territoire, sans que quiconque ne soit informé des raisons ou du lieu où il se trouve désormais. Ce départ suscite une inquiétude feutrée parmi la grande oligarchie haïtienne, sans pour autant entamer leur ascendant sur les affaires de l’État. Au contraire, leur emprise ne cesse de s’étendre dans tous les secteurs liés à l’importation et à l’exportation.
Dans une publication sur Facebook, George Sami Saati, acteur du secteur privé haïtien, se réjouit ouvertement en qualifiant Eddy Deeb de « manipulateur toxique, narcissique et sociopathe », ajoutant qu’« il est temps que la justice fasse son œuvre, il devra en répondre ». Cette prise de position révèle que l’oligarchie haïtienne n’est pas un ensemble uniforme comme certains le prétendent : on y trouve, bien que très peu nombreux, des individus prêts à évoluer dans un cadre légal et respectueux des institutions.
Si la série d’arrestations d’oligarques haïtiens à Miami se poursuit, il deviendra impératif de reconsidérer la capacité des infrastructures carcérales nationales afin de pouvoir accueillir ceux qui se retrouvent derrière les barreaux aux États-Unis. Ce phénomène, loin d’être anecdotique, pourrait bien voir le nombre de détenus augmenter considérablement, au point où l’on pourrait parler de centaines d’oligarques nécessitant des lieux de détention adaptés. Cette situation met en lumière non seulement l’intensité des poursuites engagées par les autorités américaines, mais aussi la nécessité, pour Haïti, de réfléchir à une éventuelle coopération judiciaire et logistique afin d’assurer le suivi de ces incarcérations et de préparer une réponse adéquate à ce nouvel enjeu transnational.
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